L'Etat uruguayen sera-t-il bientôt le dealer officiel de son peuple ? La coalition de gauche au pouvoir veut établir un monopole d'Etat pour la production et la distribution de marijuana, rapporte le Christian Science Monitor. Le gouvernement espère, grâce à cette mesure choc, éradiquer les crimes liés au trafic de drogue, réduire les risques sanitaires pour les consommateurs et surtout prendre à contre-pied les politiques américaines en matière de lutte antidrogue, régulièrement désavouées publiquement par les pays d'Amérique du Sud.
"La guerre de la drogue a échoué. Il y a toujours plus de consommateurs, et toujours plus de violences", a constaté, amer, le président de la commission parlementaire chargé du dossier, Sebastian Sabini. "L'Uruguay va ouvrir une nouvelle voie (...) et nous espérons qu'elle deviendra une norme internationale", a-t-il ajouté pour présenter le projet de loi. Lancé début septembre, le débat devrait durer six mois au Parlement et fera l'objet d'un vote au Congrès ensuite. Les spécialistes se montrent confiants, étant donné que la coalition au pouvoir a la majorité dans les deux chambres, et que d'autres parlementaires ont déjà assuré le gouvernement de leur soutien sur cette mesure d'un tout nouveau genre.
Si l'Uruguay devient le premier pays au monde à adopter ce type de législation, il pourrait bien devenir un exemple dans le reste du continent. De nombreuses voix se sont élevées ces derniers mois pour critiquer l'échec des guerres menées contre la drogue, dans un continent ravagé par les violences liées aux trafics. En avril, le président du Guatemala, Otto Perez, avait ainsi lancé un appel à la dépénalisation des drogues comme "alternative" pour lutter contre la violence qui déferle sur l'Amérique centrale. Partant du constat que "la consommation et la production de drogue sont toujours plus importantes" malgré des années de lutte gouvernementale, Otto Perez en appelait à "réguler" le marché de la drogue, à l'instar de ce que "[le pays a] pu faire pour l'alcool ou le tabac".